Quand on me demande de citer des exemples de production MoJo, Philip Bromwell est l’un des premiers noms qui me vient à l’esprit. Professionnel chevronné, esthète des sujets « mobiles », ce reporter d’images pour les journaux télévisés de la RTÉ (le radiodiffuseur public irlandais), est un pionniers et l’un des principaux acteurs et moteurs du MoJo de la chaîne irlandaise. Ses sujets mobiles pour l’antenne de la RTÉ ou ses réseaux sociaux (visibles sur Vimeo), des portraits le plus souvent, sont de véritables pépites en termes de cadres et de composition. Ses dernières réalisations au format carré (comme celle ci-dessous) ne dérogent pas à la règle. Classique dans sa forme, son travail reste un excellent modèle pour quelqu’un qui, comme moi, forme au reportage d’images. J’ai donc interrogé Philip Bromwell sur son métier, son équipement et sa façon de travailler.
Food waste is a costly and environmentally damaging problem, but one group in County Antrim believes their « community fridge » could be part of the solution. pic.twitter.com/9sUIMTizih
— RTÉ News (@rtenews) 24 janvier 2018
LC : Quel est votre parcours ?
PB : « Cela fait 20 ans que je suis VJ (« Video Journalist », JRI -Journaliste Reporter d’Images en français-) d’abord pour la BBC puis pour la RTÉ. Durant ce temps, j’ai produit de très nombreux sujets locaux et à l’étranger, en couvrant par exemple les JO ou les Oscars. Je filme et monte sur smartphones depuis 2013, j’ai réalisé mon premier sujet MoJo pour la télé en 2014. Je crois que c’était avec un iPhone 4. »
LC : 100 MoJo% aujourd’hui ?
PB : « Non. Aujourd’hui j’ai tendance à jongler avec les caméras en fonction des reportages : le choix de mon équipement dépend vraiment du sujet, de sa nature et du temps que j’ai pour le réaliser et le publier. Pour le MoJo, j’utilise actuellement un iPhone 8Plus pour filmer et monter les sujets de A à Z, avec FiLMiC Pro côté caméra et LumaFusion pour le montage. A la RTÉ, nous utilisons plus d’une cinquantaine d’applications pour créer des contenus d’information pour le Web et les réseaux sociaux. J’utilise un grip Shoulderpod. Côté micro un iRig Mic HD et un Sennheiser Clip Mic Digital. Et puis un trépied Manfrotto BeFree et une minette LumeCube. Pour certains sujets j’ai encore recours à une caméra Sony X70. »
LC : Comment travaillez-vous vos sujets MoJo?
PB : « Je pense qu’avec une vraie caméra ou un smartphone, ma façon de filmer est un peu toujours la même. Le MoJo n’a pas fondamentalement changé ma façon de travailler. Même si cela a été un challenge agréable et qu’il est devenu un atout majeur dans mon champ de compétences. Il y a eu déjà quelques articles sur mon travail. C’est encore rare de voir le reporter télé d’une chaîne nationale utiliser les outils mobiles pour produire efficacement du contenu broadcast. Malgré ses limites, je pense que le smartphone offre surtout des avantages. C’est évidemment LA caméra, à la fois la plus simple et la plus performante pour le commun des mortels. Sa technologie s’améliore en permanence et sa connexion directe avec le public (via différentes plateformes) et de plus en plus importante. »
LC : En combien de temps réalisez-vous un sujet ?
PB : « En tournage, je prends toujours l’intégralité du temps dont je dispose. Je produis essentiellement des sujets courts. Alors je dois tourner 2 ou 3 heures maximum quand j’ai besoin de réaliser un 2 minutes. Il ne faut pas oublier que j’ai produit des centaines de sujets depuis 20 ans, sur une ribambelle de caméras. Ma façon de filmer et de monter des sujets est mûre, et j’utilise le smartphone comme n’importe quelle autre caméra. Je pense que mon travail fait la preuve qu’avec un peu de technique, on peut produire du contenu broadcast avec son téléphone… Mais qu’un peu d’imagination et de créativité ne gâchent rien ! »
Le style Philip Bromwell
Si le travail de Philip Bromwell est emblématique à mes yeux, c’est qu’il fait la synthèse de tout ce que l’on attend classiquement d’un JRI exigent. D’abord des plans fixes exclusivement, bien stabilisés sur trépied. Ensuite des cadres bien composés selon la règle des tires, avec des lignes de fuite, beaucoup de gros plans avec souvent peu de profondeur de champ. Et puis des raccords dans l’axe et des entrées/sorties de champs avec les raccords qui vont avec au montage. Pour moi, Philip Bromwell est le champion des « histoires » journalistiques, enchaînant les plans dans un véritable souci de continuité narrative visuelle.
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